dimanche 25 septembre 2011

Guibourg Delamotte - La politique de défense du Japon

 Guibourg Delamotte, La politique de défense du Japon, PUF, Paris, 2010.


Les ouvrages sur les politiques de défense étrangères sont rares en français, plus encore sur le Japon, qui donne a voir de nombreuses singularités. D’accès difficile à la recherche pour des raisons linguistiques et culturelles évidentes, la défense japonaise, entre dépendance vis-à-vis des Etats-Unis et quête de « normalisation » sur la scène internationale, fait l’objet ici d’une étude fondée d’abord sur les débats politiques et les évolutions constitutionnelles qui ont présidé à l’organisation des « Forces d’autodéfense ». Cette armée qui ne dit pas son nom, comme le regrettait dans la première moitié des années 2000 le Premier ministre Koizumi, étant gérée par une « agence de la défense » qui n’est devenue « ministère » qu’en 2006.
Pressé par ses alliés (à commencer bien sûr par les Etats-Unis) de s’impliquer davantage dans les affaires internationales, inquiet de la menace nord-coréenne mais aussi de la montée en puissance chinoise, le Japon peut-il encore s’en tenir aux principes de contribution à la paix et d’autolimitation, énoncés lors de la reconstruction du pays après la Seconde Guerre mondiale ? Peut-il faire l’économie d’une armée plus structurée, plus puissante, plus influente y compris sur le plan intérieur, lui qui a les moyens financiers et technologiques d’assumer une défense de pointe ? Les contraintes économiques, les réticences de l’opinion publique, le carcan constitutionnel freinent une telle évolution. Mais les transformations régionales l’appellent. Le rejet du nucléaire, les hésitations à assumer une plus grande implication dans les Nations Unies, la présence de 37.000 soldats américain sur le territoire (VIIe Flotte non comprise), constituent autant d’éléments d’une équation japonaise complexe.

Un peu à la manière de l’ouvrage de Marie-Christine Kessler sur la politique étrangère de la France en 1999, Guibourg Delamotte défriche ici un terrain qui impose de commencer par le commencement, c’est-à-dire par la présentation des textes, des acteurs, des contraintes. Elle choisit en effet de revenir sur ces paramètres, là où d’autres travaux passent directement aux tensions régionales, à la question chinoise, où à l’estimation des capacités en présence sur le théâtre asiatique. En conséquence, ce travail sur « la politique de défense du Japon » est bien conforme à ce qu’indique le titre : il est bien question ici de l’élaboration d’une politique publique, dans son environnement national, avec son histoire propre, histoire dont il n’est pas facile de sortir. Ce retour aux conditions d’élaboration d’une politique est le bienvenu. Il constitue d’ailleurs, sans doute, la partie la plus difficile de la compréhension de la défense japonaise, dans la mesure où il exige connaissance du terrain, entretiens avec les acteurs, compréhension des textes. Maître de Conférence à l’Inalco et spécialiste des questions japonaises, Guibourd Delamotte était probablement l’une des mieux placées pour l’accomplir.

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