À quoi pourrait ressembler la politique étrangère de Joe Biden ?
À quoi ressemblera la politique étrangère d’une Amérique post-trumpienne, avec Joseph Biden et Kamala Harris à sa tête ? Assistera-t-on à la fermeture d’une parenthèse baroque et tumultueuse, pour retrouver la « vie internationale d’avant » ? Verra-t-on se bâtir un nouveau socle pour une nouvelle diplomatie américaine ?
L’après-Trump, du point de vue de l’action extérieure américaine, pose d’abord beaucoup de questions. En la matière, le 46e président devra tenir compte d’une nouvelle donne, inédite aussi bien du point de vue intérieur américain que du point de vue international.
Si Joseph Biden, contrairement à son prédécesseur, est un connaisseur des questions mondiales, sa tâche ne sera pas aisée pour autant.
Les questions
La première interrogation qui vient à l’esprit a trait à l’importance des dégâts causés par un Donald Trump qui a fait évoluer les fondamentaux en quatre ans. Ces dégâts sont-ils réparables ? Suffisamment pour permettre à Biden de se replacer dans la ligne de la « retenue » propre aux années Obama ? L’ancien président (2009-2017) avait amorcé un retrait de la scène mondiale, avec un moindre recours à l’intervention militaire, des discours d’apaisement (à West Point en mai 2014), le choix de ne pas frapper le régime syrien en août 2013, ou des concepts novateurs, comme le « leadership from behind » en Libye, en 2011. Il s’était efforcé de donner une cohérence à l’action extérieure américaine. Cohérence parfois jugée trop intellectuelle, et mal comprise de ses principaux alliés, mais cohérence quand même, surtout comparée à l’action erratique et impulsive de son successeur.
Autre question majeure : qui entourera Biden sur les dossiers internationaux ? Le long parcours politique du nouveau président lui confère une expérience rare. Il a notamment présidé la commission des Affaires étrangères du Sénat. On peut imaginer auprès de lui le retour de noms connus : Antony Blinken, Susan Rice, Michelle Flournoy – peut-être comme secrétaire à la défense –, Samantha Power, Elisabeth Sherwood-Randall mais aussi William et Nicholas Burns… Autant de penseurs chevronnés de l’action extérieure démocrate. Les sénateurs auront également leur importance : Bob Menendez – la vieille garde –, mais aussi Chris Murphy ou Chris Coons (issu de la « Delaware connection » et qui pourrait devenir secrétaire d’État). Il ne faut pas exclure non plus l’inclusion d’une partie du cercle de l’ancien sénateur républicain John McCain, disparu en 2018 : les équipes ont travaillé ensemble, une estime mutuelle bipartisane existe. Julie Smith et Jeff Prescott, anciens Deputy National Security Advisors de Biden lorsqu’il était vice-président, pourraient revenir.
Y a-t-il des courants identifiables parmi eux ? Un débat existe entre « restaurationists » et « reformers » – partisans de restaurer la politique étrangère traditionnelle ou, à l’inverse, de prendre un nouveau départ –, notamment sur la question d’un découplage avec la Chine, sur l’alliance avec les démocraties et sur la promotion internationale des normes libérales. Un courant progressiste au parti démocrate, plus enclin à la rupture (notamment dans un sens plus environnementaliste, ou plus porté vers le Sud que vers les alliés traditionnels des États-Unis, comme la vieille Europe), et centré autour des personnes de Bernie Sanders et Elisabeth Warren, peut également se faire entendre. Enfin, l’ancien candidat aux primaires démocrates Pete Buttigieg est l’une des figures réformatrices montantes, qui avait surpris par son charisme lors des primaires : certaines rumeurs l’annoncent comme possible ambassadeur aux Nations unies.
Drnière interrogation, et pas des moindres : quelle sera l’influence de la vice-présidente Kamala Harris, membre de la commission du renseignement au Sénat ? Sur quels dossiers internationaux aura-t-elle la main ? Comment voit-elle l’Europe (elle qui vient de la côte ouest), le Moyen-Orient, le monde émergent (elle qui a des origines indiennes et caribéennes) ? L’âge de Joseph Biden (78 ans) donne naturellement à la vice-présidence une importance inédite : Kamala Harris pourrait être amenée à poursuivre l’action du président dès la fin du premier mandat, voire terminer celui-ci si le titulaire connaissait des problèmes de santé.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire