En quelques années, l’environnement stratégique de la
France et de l'Europe s’est assombri. Les suites des soulèvements arabes au sud,
les menées de Vladimir poutine à
l’est, une crise européenne financière, politique (illustrée par le Brexit),
morale (crise des réfugiés) et sécuritaire (retour du terrorisme), ont mis fin
à l’illusion d’une Europe « post-tragique ». Dans le même temps, des alliés
s’interrogent sur la garantie de sécurité américaine. Comment imaginer que cet
ensemble ne constitue pas un défi majeur pour les prochains dirigeants
français, de gauche ou de droite, après l’échéance électorale de 2017 ?
Commençons, en l’occurrence, par la droite.
Une boîte à outil doctrinale nécessairement pragmatique
Il est difficile d'identifier en France une politique
étrangère de droite ou de gauche : les débats sont trans-partisans
(alliance atlantique, Proche-Orient, Russie…), l’attachement au devoir de consensus
reste fort, et les partis de gouvernement ont travaillé plusieurs fois ensemble
(en période de cohabitation ou pas : Bernard Kouchner fut ministre de
François Fillon). Il n’en reste pas moins que dans les vingt dernières années, deux
présidences de droite (Chirac 1995-2007, Sarkozy 2007-2012) peuvent offrir à
leurs héritiers un corpus de doctrine, des leçons à tirer, ou un devoir
d’inventaire.
Ces présidences n’ont pas été monolithiques. La période Chirac
a connu une phase de volontarisme politique en 1995-97 (reprise des essais
nucléaires, posture ferme dans les Balkans ou au Proche-Orient) ; une
convergence réaliste entre le président
et son ministre de cohabitation Hubert Védrine (2002-2007) ; le rejet assumé
et mis en scène de la guerre américaine en Irak (2002-2004) ; enfin un
rapprochement avec Washington. Sous Nicolas Sarkozy, l’annonce d’une rupture teintée
de droits-de-l’hommisme fut rattrapée par les réalités internationales, et Alain
Juppé revint au Quai en 2011. Initiatives multilatérales (au G20) et
interventions militaires (Afghanistan, Côte d’Ivoire, Libye), grands desseins
collectifs (l’Union pour la Méditerranée) et influence d’acteurs hors-système
(Bernard-Henry Lévy sur l’affaire libyenne), furent combinés.
Au moins, certaines discussions n’ont plus lieu d’être. La
question de l’OTAN est réglée : envisagé par Jacques Chirac en 1996-97,
concrétisé par Nicolas Sarkozy en 2009, le retour français dans les instances
intégrées est acté. Par ailleurs, l’opposition entre « gaullo-mitterrandisme »
et néo-conservatisme comme grille de lecture des postures diplomatiques a
montré ses limites. Vouloir se contenter de reproduire la geste gaullienne dans
le monde actuel sans l’actualiser n’a aucun sens. L’essence très américaine du
néo-conservatisme, courant intellectuel né à gauche et marqué par une
diplomatie transformationnelle, s’applique mal à la France (même s’il a ses
partisans). C’est en réalité une nouvelle discussion qui s’ouvre, dans laquelle
la droite modérée a des points de repères possibles.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire