Charles-Philippe
David, Au sein de la Maison Blanche. De
Truman à Obama, la formulation (imprévisible) de la politique étrangère des Etats-Unis,
Presses de Sciences Po, Paris, 2015
Décidément prolixe
sur le sujet (voir plus loin la revue de son ouvrage La politique étrangère des Etats-Unis), Charles-Philippe David nous
offre la troisième édition de son ouvrage de référence sur la politique
étrangère de Washington. Avec presque 1.200 pages dont 40 pages de bibliographie,
plus des annexes fournies, ce travail vise à conserver son rang de
« bible » en la matière. On voit mal, à vrai dire, ce qui pourrait
manquer ici à l’étudiant ou au chercheur désireux de faire le tour de la
question, depuis les approches théoriques jusqu’à l’analyse décisionnelle. Le
déroulé chronologique qui suit (à partir du chapitre 4, qui commence avec truman), demeure très analytique,
qualifiant chaque fois le style présidentiel qui aura marqué la période :
« institutionnalisée » sous Truman, la politique étrangère américaine
fut « présidentialisée » sous Kennedy et Johnson, « impériale »
sous nixon, « assagie »
sous Ford, « compétitive » sous Carter, « désorganisée »
sous Reagan, « réhabilitée » sous George H. Bush,
« réorientée » sous Clinton (le diagnostic est plus sévère dans
l’autre ouvrage référencé plus loin), « inféodée » sous George W.
Bush, elle est enfin « calculatrice » sous Obama, qui a voulu faire
triompher la Realpolitik mais n’a
réussi qu’à la mettre à l’épreuve. Chaque présidence est en outre
« testée » à la lumière d’une étude de cas choisie :
l’Indochine, le Vietnam, l’invasion du Cambodge, la crise du Mayaguez, la chute
du Shah, l’affaire Iran-Contra, l'Irak, la Bosnie, l'Irak à nouveau, enfin l’Afghanistan.
Il peut paraître paradoxal, sur cette période, d’accorder autant d’importance à
l’Asie et si peu à l’URSS, mais les exemples choisis se veulent illustratifs
d’un fonctionnement interne, plus que d’un état du système international.
Charles-Philippe
David, et avec lui toute une école québécoise – par ailleurs non monolithique –
portent avec talent le flambeau de l’analyse francophone de la politique
étrangère des Etats-Unis, en compagnie naturellement de plusieurs chercheurs
français. Il faut rendre hommage à cet effort, à l’ampleur de cette production
à son utilité surtout, à l’heure où le décryptage de la stratégie américaine et
de son évolution demeure l’une des clefs de voûte de l’analyse des relations
internationales. Dans la plupart de ses travaux, Charles-Philippe David a à
cœur de dépasser l’écume du moment pour rappeler les racines, les courants de
pensée, les pesanteurs historiques, idéologiques, culturels, bureaucratiques,
qui agissent sur cette projection américaine dans le monde. Il est bon de
l’écouter.
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