Institut François
Mitterrand, Ministère de la défense,
François Mitterrand. La France et sa défense.
Paroles publiques d’un président – 1981-1995, Nouveau Monde, Paris, 2015.
Textes édités sous la direction de Georges Saunier et Philippe Vial, Préface de
Jean-Yves Le Drian et Hubert Védrine.
Ce recueil des
principaux textes, discours et interviews de François Mitterrand sur la
thématique de la défense s’imposera comme outil de référence. En deux
septennats (dont quatre ans de cohabitation), François Mitterrand a conduit un
nombre important d’opérations militaires, dont beaucoup en Afrique, mais
également au Moyen-Orient. Il a réaffirmé le principe de dissuasion nucléaire,
qu’il a même incarné avec majesté (« la dissuasion c’est le président de
la République. C’est moi »). Il a dû adapter l’outil de défense à un monde
post-bipolaire que personne n’avait vu arriver si vite, et dont les défis
furent nombreux dès sa présidence (guerre du Golfe de 1991, éclatement de la Yougoslavie,
conflit ethniques en afrique,
comme au Rwanda…). Du fait de son équation personnelle (un président de gauche
qui avait réconcilié son parti avec l’instrument militaire, et devait démontrer
qu’il était bien un chef des armées), du fait du contexte systémique international
(d’abord les dernières tensions de la guerre froide, puis un nouveau monde, une
nouvelle Europe, qui ne permettaient aucune faiblesse), du fait enfin du contexte
politico-normatif (la fermeté de Reagan et Thatcher chez nos alliés),
Mitterrand fut interventionniste, prit des initiatives militaires fortes (comme
au Tchad contre la Libye, avec les opérations Manta puis Epervier), accomplit
des gestes politiques importants (une visite à Sarajevo, ou encore le double
sauvetage d’Arafat au Liban en 1982 et 1983). Il connut aussi, déjà, les
difficultés d’interventions ô combien risquées, dans des contextes inextricables
de guerre à la fois civiles et internationalisées, et qui au bout du compte
exposent singulièrement celui qui les
entreprend à l’heure d’un monde médiatisé. Les opérations rwandaises, aujourd’hui,
font toujours débat.
Le travail accompli
ici permet de relire dans le texte ce tournant de l’histoire, avec les mots du
chef de l’exécutif français de l’époque. Les photos insérées, les repères
chronologiques et bibliographiques ajoutés en annexe, rendent l’ensemble plus
utile encore. On ne peut qu’appeler de nos vœux la systématisation de ce type
d’entreprise pour les présidences passées. Si Jacques Chirac a son propre recueil
de textes de politique étrangère (Mon
combat pour la paix, 2007), son bilan académique (La politique étrangère de Jacques Chirac, dirigé par M. Vaïsse et
Ch. Lequesne, 2013), et quelques études de défense qui firent date (B.
Irondelle, La réforme des armées en
France : Sociologie de la décision, 2011) l’analyse de la période
Mitterrand tirera grand profit de ce travail d’historiens. Une période clef à
redécouvrir d’urgence par les politistes, dont le livre de référence, en
réalité, reste celui d’un acteur : Les
mondes de François Mitterrand (1996), par Hubert Védrine.
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